Les cailles de noël

15 juin 2007 at 21 h 05 min

Certains chasseurs parlent de cailles prélevées parfois très tard dans la saison, jusque fin décembre.
On peut s’en étonner, car la caille des blés est un gibier migrateur qui commence à quitter notre pays dès la mi août, et qui devrait avoir atteint l’Afrique depuis longtemps à cette période de l’année…

Les cailles de Noël (c’est leur surnom) cela existe bel et bien… Voici quelques années, je me rappelle avoir prélevé 7 cailles dans un chaume de sorgho moissonné tardivement en raison des intempéries. C’était un 27 décembre.
Il s’agit tout simplement de cailles sédentarisées. Les raisons de cette sédentarisation sont hypothétiques: des couvées tardives qui ont raté le coche de la migration, une insuffisance d’impulsion migratoire (hybridation avec des cailles japonaises?), le réchauffement climatique qui tendrait à ce que les cailles se sédentarisent en raison de conditions plus clémentes l’hiver (cela reste à prouver).
Le plus dur pour elles est de trouver en hiver un champ, une friche, une bordure de fossé, encore intact qui leur permettent de subsister .
Plusieurs cartes signalant la répartition de l’espèce désignent le sud de la France (et notamment le littoral Provençal) comme faisant partie des zones ou la caille peut résider (du moins lorsque les hivers sont doux). Autre argument enfin: selon ce que j’ai pu lire sur le sujet, jusqu’à 5 pour cent des individus peuvent être naturellement dépourvus d’impulsion migratoire.
Ce phénomène avait déjà été décrit par Pierre Belon (16eme siècle), puis Buffon (18eme siècle), et n’a rien de nouveau.
Les paysans locaux avaient surnommés « Trevadissos » (en occitan) les oiseaux restés après les grands départs d’automne.

Rare sont ceux qui chassent la caille au mois de décembre ou de janvier, et il faut se donner la peine de les chercher. Je l’ai fait pour vous, photo à l’appui… Le 19/01/2007 dernier, après une heure de traque environ, May est parvenu à bloquer une caille dans un chaume d’une dizaine d’hectares (photo ci-dessous de ce dernier à l’arrêt).

Arrêt sur caille

Quelques chasseurs du sud de la France, très spécialisés il est vrai, continuent de chasser la caille jusqu’à la fin du mois de décembre, voire au delà. Même si les oiseaux sont rares, on continue à en trouver quelques uns dans certains chaumes laissés sur pied… C’est une chasse pratiquée par une petite poignée de passionnés.

Cailles japonaises: les dangers de l’hybridation

15 juin 2007 at 20 h 30 min

Une sous espèce de caille venant d’Asie, la caille japonaise (coturnix japonica), est couramment élevée en France. Cette dernière, domestiquée depuis longtemps, est facile à élever. C’est la caille de chair que l’on trouve au marché, ou sur l’étal du boucher…

caille mélanique et caille de tir, F.Bérille

Les lâchers de cailles japonaises étant interdits depuis toujours, les éleveurs ont eu l’idée de croiser des cailles des blés et des cailles japonaises. Cette hybridation était destinée d’une part à améliorer les piètres qualités de gibier des cailles japonaises, trop grosses, et quasiment incapable de voler, mais aussi à contourner la règlementation. Rien ne distingue morphologiquement (ou presque) les cailles des blés naturelles de certaines cailles hybrides.
Certaines ACCA, afin de palier à la baisse des effectifs de cailles des blés (coturnix coturnix coturnix), ont procédé pendant des années à d’importants lâchers d’individus hybrides, comme cailles de tir.
Des études ont démontré que les individus hybrides, lâchés massivement dans la nature, sont parfaitement capables de se reproduire avec les cailles sauvages. Pire, les hybrides mâles ont quasi systématiquement le dessus sur les mâles sauvages, gênant leur reproduction. Il résulte de ses croisements une pollution génétique dangereuse pour la caille des blés.
En effet, les cailles hybrides, en se croisant avec les cailles sauvages, donnent des individus majoritairement dépourvus d’instinct migratoire. Du fait qu’ils ne migrent pas, et que les conditions en France leur sont défavorables, peu survivent.
Les cailles des blés sauvages, en se croisant avec eux, n’ont donc pas pu léguer leur patrimoine génétique, et leur population migratrice n’est pas renouvelée.
certains individus hybrides, qui ont conservé un minimum d’impulsion migratoire, et qui parviennent à se rendre en Afrique du Nord, polluent le réservoir naturel de l’espèce situé la bas (formation de population sédentaires). Les individus hybrides qui, sans aller jusqu’en Afrique, ont atteint des zones favorables à leur survie, comme le sud de l’Espagne, tendent également à créer des populations sédentaires…
Seule une étude du chant permet de distinguer les individus hybrides des cailles des blés « Pures », et ainsi évaluer le degré de pollution d’une population.
Rappelons le: les lâchers de cailles japonaises, et de cailles hybrides sont totalement interdits en France. Il ne faut donc lâcher sous aucun prétexte dans la nature des cailles japonaises (ou hybrides) vivantes pour l’entrainement des chiens d’arrêts. D’abord parce que ces cailles volent mal, et qu’elles sont attrapées quasi systématiquement par le chien (qui comprend qu’il n’ a pas besoin d’arrêter pour attraper du gibier: cela l’incite à le « bourrer »), mais aussi parce qu’il en va de la survie des cailles migratrices.
Sources: http://vogelwarte.mpg.de/documents/seb/DeregnaucourtetalApplAnimBehavSci2005.pdf
http://vowa.ornithol.mpg.de/documents/seb/BarilanietalBiolcons2005.pdf

Les caillères

5 mars 2007 at 21 h 35 min

Dans un ouvrage intitulé « Chasses en Provence », et publié en 1896,
J-B Samat décrit assez précisément un mode de chasse à la caille très original, et aujourd’hui disparu : les caillères. Cette technique
« mixe » en effet plusieurs modes de chasses entre eux : emploi de cages avec appelants, tir au fusil, battues et utilisation de chien d’arrêts.
« Ce gibier se chasse partout au chien d’arrêt, mais nous avons perfectionné ce sport, en établissant des caillères avec appeaux. Ces caillères sont installées autant que possible sur terrains plans ; celles de Montredon, les plus réputées, étaient faites de petits pins tenus fort bas et taillés régulièrement à environ 60 centimètres du sol ; des allées parallèles les sillonnaient, tout comme dans les tirés de l’état à Marly, à Fontainebleau, à Compiègne. Entre les allées étaient placées des bigues verticales où pendaient à demeure des cages contenant chacune une caille. Ces cages sont perfectionnées de telle façon que l’appeau y soit abrité de la pluie et que l’on puisse lui donner à boire et à manger sans dérangement. Elles sont généralement au nombre de 3 à 6, superposées le long d’une planche en bois, fixées au sommet de la bigue par une armature en fer et un boulon à pivot qui lui permet de tourner au vent en présentant le dos des cages.
Dans certaines caillères, les bigues sont placées isolément, dans d’autres elles sont par paires, par trois, même par quatre. A notre avis, il est préférable de les séparer. Les cailles venant se poser sous les cages, il arrivait souvent, lorsqu’il y en avait beaucoup, qu’on en faisait lever une grande quantité au pied des bigues, et il s’en échappait ainsi un certain nombre, quoiqu’on pût les voir remiser facilement.
On entrait autrefois dans la caillère sans chien et on faisait une battue en marchant avec quelque bruit. La présence des chasseurs, les coups de fusil, en levaient une certaine quantité, et lorsqu’un premier déblaiement était fait, on demandait les chiens et l’on reprenait la caillère en détail pour lever celles qu’on avait laissées et retrouver celles que l’on avait manquées.
La battue commençait à huit heures, pouvait durer ainsi jusqu’à midi et demi ; on la reprenait le soir vers quatre ou cinq heures, toujours avec fruit, car les cailles dispersées ou oubliées le matin se donnaient rendez vous au pied des bigues.
Le renouvellement des oiseaux n’était pas bien difficile, on tendait quelques tirasses (filets en forme de poches) au pied des bigues et on prenait ainsi une quantité de cailles ; on tuait les femelles et on gardait les mâles. »

Récit d’une ouverture en Algérie

5 mars 2007 at 21 h 30 min

La caille est un gibier migrateur, présent dans de nombreux pays comme le montre le témoignage que m’a adressé Djamel Talha. Ce dernier m’a envoyé le récit d’une belle journée d’ouverture de la chasse en Algérie, ainsi que quelques photos… Au programme: perdrix Gambra, et bien sûr quelques cailles.

Ce dernier écrit:
« Mon territoire de chasse, se trouve au environ de mon village natal «Aoubellil», qui se situe a 100 Km d’Oran, la plus grande ville de l’ouest Algérien.
Le territoire est constitué de terrains accidentés, avec quelques plaines. Il est surtout composé de champs de céréales, mais aussi de fèves, pois chiches, ail… Il y a également de vastes étendues de vignes. Ce territoire est assez ouvert, et on n’y trouve que quelques arbres: figuiers, oliviers…

Territoires de chasse en Algérie

Ici, la chasse à la caille, se pratique après les moissons. Mon père me disait toujours, que c’est un oiseau difficile à tirer, ce que j’ai encore pu constater durant ma journée d’ouverture.
Selon les témoignages de plusieurs chasseurs et d’agriculteurs, leur nombre semble avoir augmenté ces dernières années. Aucune étude précise n’ayant été réalisée ici sur cette espèce, il est toutefois difficile d’avoir une estimation exacte de la densité des oiseaux. Je pense pour ma part que l’augmentation du nombre de cailles est dû au fait que la chasse a été interdite pendant plus de 10 ans en Algérie, a cause des « événements » dont tout le monde a entendu parler.Cette interdiction a favorisé la prolifération du gibier en général.

Ma journée de chasse s’est déroulée en famille. Elle a commencée tôt le matin. Je me suis rendu sur les terrains en compagnie de mon père, de mon frère Smain, de mon fils Adam qui a 5 ans, ainsi que de deux amis chasseurs.
J’ai mis mon fusil sur l’épaule (il s’agit d’un Robust 222 calibre 16) et emporté une musette garnie de provisions pour la journée. J‘y ai également glissé quelques cartouches, dont deux « spécial cailles » fabriquées « maison ».
Le gibier que nous chassons prioritairement la bas est la perdrix «Gambra» (Alectoris barbara), qui se différencie des autres espèces européennes par un collier marron piqueté de blanc. J’aime particulièrement les chasser dans les vignes car cela me permet de voir le spectacle des perdreaux qui courent le long des rangées, l’un derrière l’autre. Nous chassons également les cailles au chien d’arrêt, ou au « cul levé ».
Au bout de quelques instants de marche, nous sommes arrivés sur un lieu appelé le « doume ». C’est un endroit aride entouré de falaises et de côteaux. La végétation se compose de palmiers nains, et de jujubiers (cédrra en arabe). Partout il y a de hautes herbes, des chardons qu’affectionnent tout particulièrement les perdrix. Seul endroit avec un peu de fraîcheur : un creux situé un peu plus bas à la fraîcheur ou l’on trouve quelques asperges sauvages.
Il nous faut à présent marcher, de falaises en terre-pleins.

Scéne de chasse en Algérie

Au bout de quelques minutes, notre petit groupe surprend une grande compagnie de perdrix qui s’envolent devant nous. Premiers coups de fusils… Après une rapide poursuite, nous avons réussi à tuer six oiseaux…

Chasse en Algérie: perdrix Gambra

Nous sommes arrivés ensuite dans un champ qui borde une petite parcelle de vigne. Alors que je marchais, je me suis fait surprendre par une première caille. Quel oiseau !!! J’ai beau être habitué, son envol suivi de son fameux cri me surprendra toujours. A peine le temps d’épauler, cette dernière est déjà hors de portée… C’est néanmoins un bon présage pour la suite, et ces dernières semblent être cette année encore au rendez vous…
Nous avons ensuite repris notre marche sous une chaleur écrasante. Mon Epagneul Breton « Vaillant » court inlassablement devant nous, insensible à la chaleur. Alors que je regarde ailleurs, mon frère Smain se met brusquement à faire de grands signes de la main. A quelques dizaines de mètres devant nous Vaillant s’est figé à l’arrêt. Ce dernier attend, une patte levée, le corps raidi… Je m’avance vers le chien, le cœur battant. C’est comme si le monde s’était arrêté l’espace d’un instant… Une caille s’envole brusquement. Mon fusil semble monter seul à l’épaule, et je tire instinctivement. Fauchée par les plombs, cette dernière tombe quelques mètre plus loin. Mon fils court ramasser l’oiseau, qu’il me tend.

Chasse en algérie: première caille

Ma première caille de l’année…
Pendant que je me laissais distraire par la beauté de ma prise, j’entendais les coups de feux des autres…
Nous avons fait vers 13h une pause sous l’ombre d’un grand platane pour manger. En raison de la chaleur nous nous sommes mis d’accord pour interrompre la partie de chasse, et la reprendre le lendemain.
Malgré quelques oiseaux ratés, ce fut une superbe matinée de chasse. »

Djamel Talha

Ouverture 2010 : des conditions difficiles

6 février 2007 at 18 h 14 min

Cette année encore de nombreux agriculteurs ont profité des averses estivales pour déchaumer, réduisant considérablement l’habitat des cailles et les terrains potentiellement disponibles à leur chasse.
Dans les rares chaumes encore sur pied, on peut constater les ravages causés par l’utilisation intensive des herbicides (roudunp notamment) avec pour résultat des champs totalement aseptisés, sans aucune plante adventice.
Durant les premiers jours qui ont suivi l’ouverture, les oiseaux semblaient en assez petit nombre dans la région sud ouest.
Les cailles étaient parfois bien présentes, mais la sécheresse estivale rendait les terrains particulièrement difficiles pour les chiens. Ces derniers ont eu souvent le plus grand mal à localiser et à arrêter correctement les oiseaux.

Aslan[800x600]Aslan 2 [800x600]caille femelle [800x600]

Quelques photos prises sur le terrain

Après des début parfois difficiles en raison de la sécheresse, la saison de chasse à pris son véritable départ vers la mi-septembre. Les pluies ont interrompu la migration et permis la pose de nombreux oiseaux. Beaucoup de chasseurs témoignent de très beaux passages de cailles, avec des tableaux assez fréquents d’une dizaine de cailles par jour. Un beau revirement après des débuts quelque peu laborieux…